mercredi 13 mars 2013

La normalité

Peut-être parce que j'ai peu confiance en moi, j'ai toujours redouté de ne pas être "normale". Je sais bien qu'au fond, la normalité, ça n'a pas de sens. Que chaque personne est unique, et que c'est cette diversité qui donne au monde sa richesse, blablabla. Mais, il n’empêche qu'il y a toujours des pressions extérieures, des amis / de la famille / de la société, qui font qu'au final, qu'on le veuille ou non, il existe une sorte de norme sociale.

Petite, ça allait encore. J'étais "normale", quoiqu'un peu trop sage aux dires de certains, mais je me sentais bien dans mes baskets. C'est en grandissant que ça s'est gâté. En CM2, j'ai eu une espèce de pré-adolescence précoce qui m'a éloignée de mes copines. Je les trouvais gnangnans à jouer encore à la poupée et au loup. Je me rappelle avoir passé toutes les récrés de la fin de l'année sur le banc à observer mes camarades s'ébattre dans la cour. Déjà très loin de ce monde-là.

Collégienne ensuite, ma plus grande préoccupation a été de me fondre dans la masse. Surtout, être comme tout le monde, surtout ne pas me faire remarquer. Un peu comme tous les ados en somme. Mais j'étais super timide et avais peu d'amis, ce qui me distinguait "des autres". Je ne me sentais pas à ma place. Au lycée, ce malaise a continué. Avec mes amies, on avait pas du tout les mêmes centres de préoccupation. Ma passion, c'était les bébés (je ne rentre pas dans les détails, vous ayant déjà raconté ça à maintes reprises.) et mes copines, c'était les garçons. Forcément, ça collait pas. Alors je faisais semblant, je jouais un jeu. Pour paraître normale. Mais j'étais tellement raide dingue de ma petite cousine de 2 ans que ça me semblait totalement anormal.

A la fac, ça c'est arrangé. Je me suis créé un bon cercles d'amies, je m’intéressais enfin aux garçons (il était temps!!), je vivais ma vie d'étudiante, j'étais mieux dans mes baskets. Mais ma famille s'inquiétait du fait que je ne sortais pas assez, que je ne faisais que des soirées tranquilles avec mes amies, bref, que je ne profitais pas de ma jeunesse. Ce n'était pas "normal". En effet, je partageais mon temps entre la fac, mes copines, le baby-sitting et mes petits cousins, qui étaient toujours omniprésents. Mais ça me convenait parfaitement. J'étais presque normale, sauf que je n'avais pas de copain. Ça me manquait, surtout quand les copines racontaient leurs expériences amoureuses...

Et puis Chouchou est arrivé. Le coup de foudre réciproque, on a emménagé très rapidement ensemble. Et pour la première fois de ma vie je crois je me suis enfin sentie normale. Bien. Apaisée. Et sûre de moi. Oui, tout ça à la fois. Je suis entrée dans le monde du travail peu après (j'avais 23 ans) et je me suis sentie adulte. J'avais vraiment détesté la période adolescente - jeune adulte, j'avais hâte de vieillir, envie qu'on me prenne au sérieux, enfin. Deux belles années ont suivies. Bon, au travail, c'était plutôt difficile, mais j'étais folle amoureuse, installée avec mon homme, je me sentais bien. Heureuse. Je me sentais pousser des ailes, j'aurais pû déplacer des montagnes. Et puis tout naturellement, on a décidé d'avoir un bébé...

Deux ans après l'infertilité est passée par là et a cassé mon bel équilibre. Quand je vois toutes mes amies qui tombent enceintes, deviennent maman sans soucis. Et moi à coté qui suis condamnée à me planter des aiguilles dans le bide et à compter les jours.

A nouveau, je ne me sens plus normale. 

19 commentaires:

  1. pfiou, c'est dingue... j'aurais pu écrire EXACTEMENT le même article... pas les mêmes centres d'intérêts, la présence de mes ptits cousins (encore maintenant... même s'ils sont au collège, c'est tjrs "mes ptits cousins" et sont hyper importants dans ma vie), la timidité, les soirées "tranquilles"... L'impression de ne pas être "normale" quand toutes mes copines viennent d'avoir leur 1er ou 2ème enfant... comme si c'était du "trop facile" pour elles alors que c'est si compliqué pr nous... et ça me tort le coeur, parfois...
    Alors je me force à me dire que le jour où on sera ENFIN maman, nous, le bonheur n'en sera que décuplé, et on aura vraiment conscience à 1000 % de la préciosité de donner la vie...
    Bisous

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. On se ressemble sur beaucoup de points.
      J'espère qu'on se ressemblera encore plus, bientôt, grâce à nos gros ventres respectifs. :)

      Supprimer
  2. Je me suis fait la même réflexion tout récemment... Moi non plus je ne me sens pas normale. Et je passe mon temps à me demander si ma tristesse actuelle de ne pas enfanter est normale. Si je ne dramatise pas, si j'en fais pas un fromage plus que les autres... Si dans mon anormalité, je suis un peu normale quand même... Compliqué tout ça... Moi aussi j'aimerais tant faire partie des Mamans... Je te bisoute :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je te rassure, moi je dramatise beaucoup, et je pleurniche tout le temps ou presque. C'est vrai que j'admire les PMettes fortes, qui ne s'apitoient pas, qui ne sont pas aigries. Moi j'y arrive pas...

      Supprimer
  3. C'est bien de ne pas être normale. Tu ne voudrais pas ressembler à tout le monde ? Tu es Gribouillette et c'est très bien comme ça.
    Comme toi, je me suis souvent sentie en décalage dans ma vie. Mais le fait d'avoir des difficultés à être maman ne me donne pas l'impression d'être anormale, peut-être parce que j'ai commencé les essais très tard.
    Moi, j'ai plutôt l'impression d'être maudite, comme si une mauvaise fée s'était penchée sur mon berceau, que le bonheur c'était pour les autres et pas pour moi...
    Bises.
    Lily.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bien sûr que non tu n'es pas maudite! J'espère que ta bonne fée va enfin revenir de ses vacances prolongées!

      Supprimer
  4. Heureusement, il y a la blogosphère !
    A nous toutes, on constitue une nouvelle norme. ;)
    Des Bises, 'tite Gribouillette.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai, heureusement qu'il y a les copines PMettes! :)

      Supprimer
  5. C'est vrai, Octobre a raison: avec la blogo, on se sent un peu plus dans une certaine 'norme'...
    Mais au-delà de ça, même si je comprends tout à fait ce que tu veux dire, je pense que cette norme (qui existe bien aux yeux de la plupart) est un vrai leurre, plutôt une apparence: rares sont les histoires 'normales', en phase avec ce qu'on s'imagine petites. Sauf que généralement les apparences sont trompeuses. J'étais pour ma part la première de mes amies à divorcer et déjà, en plus de l'infertilité qui était alors déjà présente, je me suis sentie complètement décalée par rapport à tous; mais dans les années qui ont suivi, les problèmes de couples plus ou moins importants se sont pointés un peu partout (clash parfois temporaire, parfois allant jusqu'au divorce avec bataille pour garde d'enfant, même parfois violence conjugale); au final, je pense que quand tu discutes dans le détail avec la plupart, il y a toujours une raison ou une autre qui fait qu'ils se sentent en décalage par rapport aux autres - mais peu vont jusqu'à l'avouer lorsque ça ne se voit pas directement.
    Bises

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai, on n'a tendance à voir que ce que les autres veulent nous montrer, la partie émergée de l'iceberg...

      Supprimer
  6. La normalité, c'est subjectif, mais en même temps, je crois que l'on ne peut pas s'empêcher de se sentir à part, où dans une sorte d'anormalité.
    Je ne me suis jamais sentie dans la normalité, de part ma personnalité (j'ai un caractère special) ou de part les épreuves de la vie qui me sont tombées dessus. j'ai toujours vu les autres autour de moi,les ami(e)s, la famille, plutot dans une sorte de cocon, il ne leur arrive rien de négatif à eux, pas d'évènements graves, pas de maladies, etc .. rien. J'ai toujours cette impression de "le bonheur c'est chez les autres", bébé couette en à peine 2 mois d'essais, etc ... Je trouve (presque) trop facile.
    Mais comme le dit Unenfantpeutetre, il se peut que tout ça ne soit qu'un leurre,les autres sauvent les apparences aussi parfois.
    Moi aussi je sauve les apparences, je fais toujours semblant de bien aller.
    Je me suis fait la même reflexion que Lisette, ma souffrance est t'elle normale? quelqu'un, une fois m'a dit que ce n'était pas normal d'en souffrir autant. Alors parfois je me le demande.Quelque part, je sais que ces personnes ne supporteraient pas le quart de ce qu'on supporte. Alors peut être qu'effectivement, nous ne sommes pas dans la normalité, parce que nous sommes plus fortes?!
    Bisouilles

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ça me plait ça, on est pas dans la normalité car plus fortes que les autres! :)

      Supprimer
  7. C'est tout le contraire ici... J'ai toujours été à côté des normes, fière et heureuse de l'être, car c'est de là que je puisse ce que je suis aujourd'hui, mes choix, ma force et ma vie. Mais aujourd’hui, punaise, même si la PMA ne m'étonnes pas (processus normal d'anormalité chez moi finalement), je dois dire que pour la première fois, oui, j'aurai bien voulu être dans "la norme"... Mais plus que d'être hors normes en matière procréative, c'est la dépendance à la médecine, l'incertitude de l'issue pmesque... qui me fait le plus mal, bien plus que cette "anormalité. En bref, si c'était idem, si j'étais hors normes de la procréation, mais que j'avais 100% de garantie (par la pma ou autre au final) sur le fait de porter mon enfant et de donner la vie, je m'en ficherai. Bref. J'espère surtout que ce passage douloureux dans nos vies, n'est qu'un passage Prometteur du Meilleur Avenir. Des bises normées !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oh, oui, j'y compte bien!
      Passage Prometteur du Meilleur Avenir, j'aime beaucoup ! :)

      Supprimer
  8. C'est dingue, j'ai toujours eu un peu ce sentiment d'être différente..de pas voir la même chose que les autres !! Même pour des choses simple tels que la clope, je n'ai jamais sauté le pas, je sais me mettre une barrière, un peu warrior la fille !! L'infidélité j'en serais incapable également, pas parce-que j'aime mon z'hom à la folie mais parce-qu'encore une fois il y a des barrières que je sais me fixer et respecter.

    Moi je me sens pas anormal mais plutôt différente et sage (peut être) ^^

    Bisous

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Moi aussi, me suis toujours sentie différente et sage, on est p'têt jumelles?

      Supprimer
  9. j'ai toujours eu ce sentiment d'etre différente des autres, très timide, j'ai l'impression que tout ce que je peux dire, n'est pas du tout interessant, alors je ne dit rien.Une nouvelle coupe de cheveux, et je me demande ce que vont en penser les autres, si on ne va pas se moquer de moi... Je n'ai jamais fait de soirée délirante, a boire, picoler et tout ça ! on m'a toujours dit que j'été trop sage ! et maintenant je me sens différente des autres, parce que ... on arrive pas a avoir un bébé naturellement ! va expliquer a ton entourage, que tu vis en fonction de tes cycles, et pas de tes envies ... je n'ai jamais eu beaucoup d'amis, et meme encore aujourd'hui j'en ai pas ... ou peu !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Punaise, nous aussi on est jumelles! Le coup d'avoir peur de ne pas être intéressante, de craindre le regard des autres! C'est moi! Même si j'ai quand même fait quelques progrès en ce domaine, en vieillissant.

      Supprimer
  10. Pour moi la normalité c'est un peu comme Bounty, j'ai jusqu'ici été plutôt fière à chaque fois que j'ai pu me démarquer de la masse. Mais c'est plus mon côté première de la classe agaçante qui ramasse plein son grade avec l'infertilité. D'habitude, je travaille, je mets les bouchées doubles, et ça passe. Il n'y a que le permis de conduire qui m'ait préparé à ça en fin de compte. La partie boulot : zéro fautes au code. La pratique : je l'ai eu au bout de la cinquième fois. J'avais honte, je me sentais nulle... Tout pareil que maintenant en fait. Le fait de savoir que s'acharner n'y changerait rien, ça me fout les boules. Et là pour le coup, oui je serais enchantée d'être dans la norme...
    Heureusement sur la blogosphère, on trouve des nouveaux repères et on finit par se trouver dans une nouvelle norme...

    RépondreSupprimer