dimanche 31 mars 2013

Du temps pour moi?

Mercredi, j'étais invitée chez Madame Lapin. Comme je l'avais expliqué il y a quelques temps, Madame Lapin, c'est une belle surprise amicale. Elle n'a attendu sa puce que 8 mois, c'est peu comparé à nos parcours du combattant, mais elle a eu le temps malgré tout de subir les annonces de grossesses. Et de mal les vivre. Elle sait ce que ça fait de désirer un enfant plus que tout. Et de voir toutes les autres tomber enceintes. Elle est toujours à l'écoute, et n'a pas besoin que je lui envoie un mail, elle, pour sentir que je ne vais pas bien. D'ailleurs, quand j'ai appris la grossesse de Barbie, c'est elle que j'ai appelé tout de suite. Et d'emblée, au son de ma voix, elle a compris que ça n'allait pas fort. C'est ça les vraies amies. Je suis vraiment heureuse qu'on se soit trouvées, elle et moi.

Nous avons beaucoup parlé, de tout, de nos hommes, de sa puce, de nos belle-mères, de ses soucis, des miens. Et, comme d'habitude, j'ai beaucoup parlé de PMA. J'avais beau faire la forte, elle sentais bien toute la pression qui s'accumule en moi depuis quelques temps. "Il faut que tu te détendes!" Oui, mais comment faire? Ce désir d'enfant pompe toute mon énergie, ma joie de vivre, mon bien-être. J'ai parfois l'impression d'être éteinte de l'intérieur. Ça  bien sûr, je ne le dis pas, même à Madame Lapin. Je ne veux pas l'effrayer. Déjà, lors de mon dernier pétage de plomb, j'ai bien fait peur à ma mère, alors maintenant, je surveille mes paroles, je pèse mes mots, j'évite de fustiger les femmes enceintes et de dire que je hais leurs bébés. Ça ne se dit pas. Ça fait désordre. 

Et puis, au cours de la conversation, la question. 

"Mais, tu es heureuse quand même?" 

Je sais que la question est sincère, que Madame Lapin s'inquiète réellement pour moi. Cependant, elle ne doute pas que ma réponse sera "oui". Après tout, j'ai un boulot stable et qu'elle a toujours rêvé de faire, un chéri adorable qui vient enfin de décrocher un CDI, une petite maison que nous nous employons à meubler et à décorer. Tout pour être heureuse en somme. Sauf l'essentiel.

J'ai essayé de répondre à la question. J'ai essayé de sourire. Mais ce sont les larmes qui sont montées à la place. Si je suis heureuse? Bien sûr que non je ne suis pas heureuse. Oui, je sais, qu'il y a des choses bien plus graves dans la vie. Il y a la famine, la maladie, la maltraitance, et tous les malheurs du monde. Mais mentir n'y changera rien. Non, je ne suis pas heureuse.

Bien sûr, après m'être essuyé les yeux et avoir retrouvé un semblant de dignité, j'ai donné le change. Mais elle a compris. A quel point c'était difficile. "Tu es à bout, là. Il faut que tu essaies de prendre du temps pour toi."

Du temps pour moi? J'en ai. Mais en profiter pour faire des choses que j'aime, je ne sais plus faire. Du temps, j'en ai même à foison, puisque je diminue de plus en plus mon temps à bosser pour l'école. J'ai gagné en efficacité au cours des dernières années, certes, mais j'ai aussi perdu beaucoup en motivation. Je n'ai pas la tête à ça. D'ailleurs, je n'ai la tête à rien, c'est bien le problème.
Ce temps précieux à ma disposition, je l'utilise à lire des blogs et forums PMA, penser à la PMA, vivre PMA... Et même quand j'essaie de voir des gens, d'aller faire un peu de shopping, de lire, je ne déconnecte jamais vraiment de la PMA. Et de ce bébé fantôme. Invisible pour les autres, mais qui prend toute la place dans ma tête et dans mon coeur.

Il faut à tout prix que je trouve un moyen de profiter du temps que j'ai à ma disposition pour m'occuper de moi. Pour faire en sorte d'aller mieux. Reste à trouver comment y parvenir...

23 commentaires:

  1. Si on me posait cette question, je ne sais pas si la réponse serait évidente non plus... Je m'efforce de positiver, de ne pas vivre "que PMA", de ne plus m'interdire des projets "au cas où", bref, de profiter de chaque petits moments de bonheur pour les mettre bout à bout et en faire un plus grand... malgré tout, rien à faire, bébé brille par son absence, et c'est pas tout le temps facile...
    Je dirais que je ne suis pas malheureuse, mais que je ne suis pas heureuse non plus... juste "mal - heureuse" ...
    En tout cas, c'est bien que tu aies cette amie sur qui compter, même si elles ne sont pas nombreuses, c'est important d'avoir quelques personnes qui nous entourent...
    bisous

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    1. Bravo Cé, car c'est pas évident. De tenir sur la longueur surtout. J'avais réussi, pendant un temps, à lâcher prise comme ça. Mais depuis un moment, je suis repartie à me laisser bouffer...

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    2. Mes rdv tous les 15 jours chez la psy m'aident à "accepter" tout ça, je crois...

      Il n'y a pas qqchose que tu aimes bien faire? un sport? des loisirs créatifs? un instrument de musique?
      Pour ça, le scrap m'aide bcp. Quand j'ai une journée devant moi, que je n'ai rien prévu de particulier et que le "vide" m'angoisse, je me mets au scrap, et ça m'occupe l'esprit, j'évite de trop cogiter... Je fais des pages, des cartes (d'ailleurs, si tu en veux une, je serai ravie de t'en envoyer une ;-) ), même des des cadeaux de naissance, et c'est comme si ça repoussait un peu l'absence de bébé au 2nd plan pour quelques heures...
      J'ai aussi un petit cahier où je me force à noter un ptit bonheur de la journée... parfois, je me dis "qu'est-ce que je vais bien pouvoir marquer?" (genre, le jour de ma pds négative, va vraiment falloir que je me creuse le cerveau LOL)... et puis finalement, je trouve tjrs quelque chose, même si c'est juste un truc du genre"le soleil qui brille"... et quand je suis vraiment mal, je relis le carnet depuis le début d'année, pour me dire "non, tu n'as pas de bébé, mais OUI tu vis des moments chouettes quand même en attendant"...
      Ce ne sont que quelques ptites idées qui m'aident, et qui pourront t'aider aussi, peut-être?...
      Bises

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    3. Dis oui, pour la carte, Gribouillette ! Les cartes de Cé sont si belles. :)

      Cé, j'aime beaucoup l'idée du carnet !!

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    4. C'est vrai que tes cartes sont magnifiques, Cé, je vais peut-être me laisser tenter! ^^

      J'aime beaucoup l'idée du carnet aussi. Justement j'ai plusieurs calepins dont je ne sais que faire. Je crois que je vais me lancer. Et dès aujourd'hui!

      Me concernant, je ne suis pas sportive du tout, je ne joue pas d'instrument (ouais, j'ai toutes les tares!) du coup quand j'ai pas le moral, je fais des gâteaux. Mais tous les jours, c'est pas possible.
      Je fais aussi un peu de scrap digital, c'est par période, des fois j'en fais plein, des fois pas du tout. Faudrait que je m'y remette...

      Merci pour tous ces conseils en tout cas!

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  2. Normal d'être triste de ne pas avoir ce bébé. Normal d'être jalouse quand une copine nous apprend sa grossesse. C'est bien humain, tout ça... Pour moi, la clef du "bonheur", c'est l'acceptation (attention, il m'a fallu plusieurs séances de psy pour savoir ça !). Une fois que tu acceptes ce qui t'arrive, tu ne cherches plus à lutter et, du coup, tu ne passes plus à côté des "belles choses" de ton existence (car il y en a forcément, j'en suis sûre !). Ce bébé, il arrivera un jour, c'est quasi certain !

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    1. J'avais vu un psy en début de parcours PMA, mais ça n'avait pas collé. J'en était ressortie en tout cas avec les mêmes conseils. Lâcher prise, accepter. J'avais essayé de les mettre en oeuvre et ça n'avait pas mal marché. Mais à ce moment là, j'avais la volonté, en ce moment, pas trop...

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    2. Faut s'accorder le droit d'être triste aussi... Une chose est certaine : le soleil revient tjs après l'orage ! Je sais bien que rien n'est simple, on a toute nos moments "bad"... Courage Gribouillette, tu l'auras ce bébé !

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    3. Merci Jonie. Je sais que j'ai le droit d'être triste, mais parfois j'aimerais reprendre le dessus, ne pas laisser la tristesse me submerger comme ça...

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  3. Oh, ma Gribouille... :(
    Je suis désolée que les choses soient si difficiles...

    As-tu le sentiment que les choses sont toujours aussi dures ? Ou y a-t-il des moments ou ça va mieux ? As-tu plutôt l'impression d'être sur des montagnes russes ? Ou le moral est-il toujours bas ?
    Parce qu'il faut faire attention à toi.
    Prendre soin de toi.
    Penser à toi.
    Tu n'y arrives pas ? C'est normal. Mais il y a du monde, autour de toi, qui peut t'aider. N'hésite pas à en parler à ton gynéco, à un médecin généraliste. Continue d'en parler aux copines. Surtout, ne reste pas isolée avec ta souffrance.

    Et en même temps, comme le dit Jonie, il faut savoir s'autoriser à être triste. Toucher le fond de la piscine, pour mieux remonter après...

    Je voudrais tellement pouvoir t'aider.
    Je ne peux que te souhaiter bon courage.
    Plein de bisous.

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    1. Disons qu'il y a des hauts et des bas, selon les jours. Mais que même les hauts ne sont plus comme avant. Y'a toujours cette envie de bébé en arrière plan.
      Mon gynéco n'est pas très à l'écoute, et ma généraliste m'a fait un petit dans le dos... elle est enceinte!
      Mais merci pour ton petit mot, ça m'aide déjà beaucoup.

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  4. Comme Cé, si on me posait la question aujourd'hui, la réponse est loin d'être évidente...
    Il est difficile de déconnecter de la PMA mais c'est aussi nécessaire à notre équilibre.
    Moi je cuisine et je suis en train d'apprendre la couture ; ça me vide la tête quand je me concentre sur mes casseroles ou sur la vitesse de mon aiguille. Alors j'espère que tu trouveras un peu de sérénité, à défaut de lâcher prise.
    Bisous

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    1. Moi aussi je cuisine, ça m'occupe l'esprit! :) Mais je ne peux pas cuisiner toute la journée non plus...
      Merci en tout cas.

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  5. Je crois qu'on cherche toutes ce truc là. Oui cet autre projet qui nous prendra les tripes et qui nous rendra heureuse...et rendra cette attente moins douloureuse. Je sais pas s'il existe, si c'est possible...mais je te souhaite d'y arriver au moins un peu.
    Bisous

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    1. Nous on envisage de faire construire, une fois le projet lancé, ça nous occupera un moment je pense... en attendant, bah on va essayer de se mettre au jardinage! ^^
      Merci pour ton petit mot Melle Pirouette.

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  6. Oh que ton post me touche... si tu savais comment je suis pareille !
    Moi non plus je ne suis pas heureuse (depuis 3 ans et 2 mois, la mort de mon bébé)... je ne vis pas, je survis... je passe le temps en attendant les résultats, en comptant les jours.
    Je n'ai plus envie de voir mes soit disant "amies" qui ne me soutiennent pas (plus) par peur de me rendre triste en me parlant de leur grossesse, ou bébé. Mais ça non plus elles ne comprennent pas que c'est leur comportements qui m'exaspèrent.
    Bref, je m'occupe tant bien que mal mais j'ai oublié mes passions.
    J'ai donc créé mon blog pour "patienter" et faire partager mon expérience. Ca m'aide, je me sens moins seule.
    De tout coeur avec toi. gros bisous

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    1. Ton témoignage me touche aussi. J'imagine à quel point cette épreuve doit être difficile à surmonter. Les proches doivent se sentir impuissants, et ne savent sans doute pas comment se comporter avec toi. C'est dommage, je suis sûre que c'est plus par maladresse que par méchanceté. Peut-être pourrais-tu leur dire ce que tu attends d'eux? Par lettre / mail, éventuellement?

      Bon courage à toi aussi!

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  7. Comment profiter de tout ce temps que l'on a ????
    THE question.
    Je cuisine aussi.
    Cela rempli + mes pantalons que le manque que je peux ressentir...
    Je tente de faire des grasses mat' le dimanche (on nous les envie tellement nos grasses mat' de nullipares).
    Et puis j'attends (le prochain cycle, que le cycle se termine, un rdv pma, une pds...).
    Désolée, tu ne trouveras pas de réconfort dans mon commentaire...
    Bisous

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    1. Oui, tout pareil! On attends sans cesse la prochaine échéance PMA...

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  8. Je me reconnais aussi. Ma famille ne comprend pas parce que j'ai aussi tout le reste pour être heureuse. Mais j'essaie autant que possible d'être sereine, de me défocaliser, et je n'y arrive pas. J'ai régulièrement envie de pleurer, je me sens à fleur de peau, et triste... Le seul endroit où je me sens bien, ce sont les bras de mon mari, quand il me serre fort. Et le fait de me sentir incomprise dans cette tristesse ne fait qu'accentuer la culpabilité à le vivre ainsi. Merci de ton témoignage, vraiment ! J'aimerais tant fermer les yeux et me réveiller quand je serais enceinte. Parce que cette série d'échecs que je vois se profiler, c'est trop lourd pour moi. Et parfois, dans un élan d'optimisme, je me dis que ça sera bientôt bon, mais je n'en sais tellement rien. Je t'embrasse.

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    1. Ton commentaire est très touchant Lisette, je m'y reconnais beaucoup aussi.

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  9. J'aime cette expression de Mal heureuse... Ca me correspond assez! Parfois je me dis "se mettre dans tous ces états pour un petit être qui n'existe pas encore qui peut etre n'existera pas ... est ce que je serai vraiment plus heureuse avec cet enfant, sera t il celui qui comblera de mal heur ou est ce autre chose?"
    Je pense que pour vivre le mieux possible l'attente mais aussi pour rendre heureux notre futur enfant il faut etre une femme épanouie essayer en tout cas ne pas se projeter que dans un role de mère mais dans les autres facettes en attendant épouse/amoureuse; amie, soeur, fille ...
    J'ai beaucoup aimé les mots d'une sage femme rencontrée poru des conseils alimentation/fertilité "ok il y a ces mois d'attente mais qu'est ce que vous voulez en faire? parce que c'est vous qui décidez ce que vous en faites... attendre ne rien faire ok mais le temps va etre long.. en profiter pour faire les choses que vous aimez consolider encore plus votre couple retrouver une sexualité épanouie de par la pma .. n'est ce pas un meilleur chemin?"
    Je pense souvent à elle ... J'ai envie de vivre enfin moi qui ait l'impression de sur-vivre depuis 2009...
    Catherine

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    1. Merci de ton commentaire et de ta venue sur mon blog. :)

      Moi j'ai du mal à me projeter dans les autres rôles, car, pour être honnête, je me suis toujours projetée dans le rôle de maman. Que ce soit quand j'était ado, avec mes cousins, plus tard avec les enfants que je gardais, maintenant avec mes élèves... c'est dans ma nature, je ne PEUX PAS faire autrement...

      La sage-femme a sans doute raison, mais entre la théorie et la pratique, hein. Parce que "retrouver une vie sexuelle épanouie avec la PMA", euh, c'est un peu incompatible! Chez moi en tout cas...

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