J'ai écrit cet article il y a bien longtemps, un soir de révolte, sans jamais oser le publier. Trop noir, trop triste. Pourtant, ce n'est que la réalité de plusieurs de mes élèves. A la campagne, on n'a pas de ZEP. Mais on a aussi de la misère sociale...
Le plus triste dans tout ça, c'est que des gamins malheureux, y'en a à la pelle. Avant d'entrer dans l'éducation nationale, je n'imaginais pas à quel point. Mais la misère, la négligence, la maltraitance parfois, sont là, si près de nous. On les côtoie tous les jours, dans nos classes.
Le plus triste dans tout ça, c'est que des gamins malheureux, y'en a à la pelle. Avant d'entrer dans l'éducation nationale, je n'imaginais pas à quel point. Mais la misère, la négligence, la maltraitance parfois, sont là, si près de nous. On les côtoie tous les jours, dans nos classes.
Tous les jours.
Ces enfants, qui poussent n'importe comment, sans tuteur pour les soutenir.
Ces enfants à qui personne ne donne de limites, et qui sont en permanence en recherche de l'autorité.
Qui retournent la classe, frappent leurs camarades, et qu'il faut sans cesse rappeler à l'ordre.
Ou qui se font tranquillement oublier, tout au fond de la classe.
Ces enfants à qui on ne prête pas attention à la maison, et qui sont tellement en manque d'affection que c'est douloureux de les repousser.
Ces enfants à qui personne ne parle, à part pour leur aboyer dessus.
Ces enfants, ballottés d'écoles en école, de maisons en foyers d'accueil.
Ces enfants, ça se lit dans leurs yeux, ne sont pas heureux.
Pas de blouson alors qu'il gèle dehors.
Pas de fournitures scolaires, même pas un stylo.
Des chaussures trop petites qui font mal, ou trop grandes de 2 pointures, celles du grand frère.
Certaines familles ne peuvent vraiment pas. N'ont pas de sous, n'arrivent pas à joindre les deux bouts.
Mais ce qui est le plus révoltant, ce sont ces Iphone rutilants dans les mains de certaines mamans.
Ce sont ces écrans plats achetés en septembre. Quand l'allocation de rentrée tombe.
Alors que leur gosse a un trou gros comme ça dans sa chaussure.
Et nous, candides enseignants, on essaie de faire entrer dans le système scolaire des enfants qui vivent dans un autre monde.
On leur demande des respecter de règles, alors que chez eux il n'y a aucune limite.
On leur apprend que "putain" est un gros mot, alors que pour eux c'est un mot courant.
On leur interdit de taper quand à la maison la règle c'est oeil pour oeil, dent pour dent.
On leur demande d'arrêter de rêver et de se mettre au travail, alors qu'ils se sont couchés bien trop tard la veille.
On leur demande de progresser, mais personne ne les aide à faire leurs devoirs le soir.
On leur demande de se concentrer, mais c'est pas facile le ventre vide.
On leur demande d'écouter, mais eux, qui les écoute?
On leur demande d'apprendre, mais leur tête est tellement pleine des soucis de la maison, le poids est tellement lourd sur leurs petites épaules, comment pourraient-ils apprendre dans de bonnes conditions?
Pourtant, à force de persévérance, quelques-uns s'en sortiront. Mais on ne pourra pas tous les sauver. On en est conscient, et ce dès la maternelle.
Egalité des chances à l'école, mon oeil.
Faut pas se leurrer, il n'y a aucune égalité.
Et nous, pauvres enseignants, sommes bien impuissants. On fait de notre mieux mais au final, on ne peut que se résigner.
"Tiens, Mme Tuyau-de-poêle est enceinte. De son 5ème gosse."
Quand on sait qu'elle ne s'occupe déjà pas des 4 premiers...
Bon sang que la vie est mal faite.
Ayant travaillé un an en Zep, dont une partie en CLIS, comme je te comprends...
RépondreSupprimerTu sembles (de ce que je lis au fil de tes posts) enseigner avec passion. Je trouve ça beau.
C'est gentil. J'aime mes élèves et je dois avouer que ces enfants me touchent particulièrement. Ils ont un côté attachant, j'aimerais tellement pouvoir faire plus pour eux...
SupprimerJ'ai une "copine" qui m'a expliqué une fois, comment elle fraudait la caf pour se payer un smartphone alors que ses enfants portent des fringues données par des associations.
RépondreSupprimerQuand je pense à tous ces gamins, j'ai vraiment mal au cœur.
La vie est mal faite.
C'est clair. Ce genre de personnes qui utilisent les sous de la CAF au détriment de leur enfant, je trouve ça... j'ai même pas de mots. Ça m’écœure!
SupprimerComme tu dis la vie est mal faite...
RépondreSupprimerEt parfois on constate aussi des injustices tout près de chez soi, ça peut être une cousine qui tombe enceinte à 16 ans, quitte l'école forcément, vit encore chez ses parents, dont le copain à 16 ans aussi, donc pas de boulot, pas de permis...des exemples j'en ai des tas...
On n'est pas là pour juger c'est sur, le seul truc c'est que nous qui avons tout pour rendre un enfant heureux et lui offrir une vie sereine, remplie d'amour, on ne peut pas en avoir... Donc je suis tout a fait d'accord, la vie est mal faite.
Oui, mais ces exemples, ils font tellement mal au coeur...
SupprimerMalheureusement, comme tu dis, la vie est mal faite. Je le constate aussi quotidiennement dans mon travail en accompagnant ces familles dont tu parles. Chez nous, on les appelle les quarts monde...
RépondreSupprimerLes "quarts monde", c'est bien trouvé.
SupprimerAlors heureusement qu'il y a quand même des enseignant(e)s comme toi pour faire un peu la balance…. crois moi c'est important et surement certains enfants s'en souviendront...
RépondreSupprimerMerci. ^^
SupprimerIl est très bien écrit ce billet Grib, criant de vérité. Oui, la vie est vraiment mal faite et on en est témoin tous les jours, sur notre lieu de travail :(
RépondreSupprimerTiti
Merci Titi :)
SupprimerJe ne le trouve pas noir ton billet. Il est malheureusement réaliste.
RépondreSupprimerJ'ai déjà pensé ce que tu écris. Et je le pense encore.
Surtout quand je vois des parents nocifs pour leur enfant ou des parents qui ne parlent de leur enfant qu'en termes de contraintes.
Bisous.
Lily.
C'est clair. On se demande pourquoi certains font des enfants. Si ça ne leur apporte que des contraintes, z'ont qu'à pas en faire...
SupprimerTon texte est saisissant de réalité :( Comme tu l'écris si bien, on se rend compte dès la maternelle de ceux pour lesquels les efforts seront vains. On ne peut rien tisser la journée qui ne sera défait le soir. C'est dur. C'est dur de se battre dans le vent. C'est pour eux qu'on est là pourtant, malgré notre impuissance face à leur difficultés et à leur vie.
RépondreSupprimerOn aimerait que ces enfants soient nés sous une meilleure étoile ...
(Rien à voir mais j'aime beaucoup ton style, ta façon d'écrire ! Tu as du talent, bravo !)
Merci beaucoup, ça me touche.
SupprimerJe trouve aussi ta phrase très bien trouvée : Ce qu'on tisse toute la journée sera défait le soir. C'est tout à faire ça.
oh oui c'est mal fait.... et tu en as partout malheureusement....
RépondreSupprimeret au fait, il n'est pas aussi noir ton billet, je m'attendais à pire que cela...comme quoi en fait c'est plus ou moins une banalité on dirait
Une banalité pour les autres peut-être mais pas pour moi.
SupprimerQuand je suis entrée dans l'EN, je croyais qu'on pouvait faire quelque chose, qu'on pouvait les sauver ces enfants là. Et je m’aperçois que dans la plupart des cas c'est impossible.
Le pire, c'est que dès la petite section, dès 3 ans, je peux déjà te dire qui dans ma classe va réussir sa scolarité, qui s'en sortira cahin caha et qui va se planter.
C'est ça que je trouve très triste.
Même constat ici.
RépondreSupprimerTu fais, on fait ce que l'on peut, on leur donne quelques limites sur nos heures de cours, de l'attention aussi, mais c'est vrai que l'on se sent impuissant.
Et combien comme ça? Oui, la vie est vraiment mal foutue.
C'est ça, on est totalement impuissants. On ne peut rien faire de plus pour ces enfants.
SupprimerTout simplement merci de m'ouvrir les yeux sur des choses que je ne connais pas encore (c'est pour bientôt car mon garçon devrait rentrer à l'école en septembre), merci pour le travail que tu fais et pour l'attention que tu portes à tes élèves. Tout mon courage pour toi.
RépondreSupprimerC'est vrai et tellement triste. Ils font vraiment de la peine ces enfants qu'on entend pas, qui pourraient être tellement heureux mais que les parents laissent de côté, comme un objet qui traîne dans la maison mais qui fait trop de bruit.
RépondreSupprimerHeureusement qu'il y a des profs comme toi dans ce monde, moi je te le dis.
Bisous
Je me dis la même chose chaque jour...
RépondreSupprimerJ'avoue avoir eu envie de tuer une mère (d'environ 30ans) ayant eu 8 gamins dont les 4 premiers sont placés dans les 4 coins de la France et dont les 4 derniers ont une pauvre vie. Alors que moi j'étais en PMA.
C'est tellement injuste. Il faut malgré tout arriver à vivre avec, à aider ces gamins du mieux qu'on peut. Je suis comme toi aux 1ères loges. Parfois je me demande dans quel monde vont grandir mes filles. Ca me fait peur...
Ton message est extrêmement bien écrit...tellement vrai!(Je reconnais la plupart des élèves de mon école dans ce que tu écris , classée en zep rurale..)
RépondreSupprimerEt oui la nature est mal faite, injuste.J'ai appris la semaine dernière que madame X était enceinte du 7 ème...elle pleure parfois au portail car elle ne sait plus comment faire pour les 6 autres..elle a plus de 40 ans...bref...c'est une triste réalité qui fait mal, c'est sûr.